« Si un individu s’expose avec sincérité, tout le monde, plus ou moins, se trouve mis en jeu. Impossible de faire la lumière sur sa vie sans éclairer, ici ou là, celles des autres »
Simone de Beauvoir – La force de l’âge
« L’information est le seul bien qu’on puisse donner à quelqu’un sans s'en déposséder. »
Thomas Jefferson,
l’un des rédacteurs de la Déclaration d'Indépendance des États-Unis,

De l'esprit des lois (1748)

Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires.
Charles de Secondat, baron de Montesquieu

1 juin 2011

6/ J'adressais des messages confus que j'imaginais 
suffisamment clairs par Chérif Delay dans Je suis debout

Page 43
Quand j'arrivais à m'exprimer, toujours indirectement, personne ne saisissait. Je n'arrivais pas à dire 
les choses dans le langage des grands, mais je n'arrêtais 
pas d'envoyer des SOS, comme des bouteilles jetées à la 
mer...
Aidez mes frères !
Je faisais des dessins. Il suffisait 
de les regarder. Tous ces pros n'avaient pas la bonne 
formation, ou alors ils ne pouvaient pas voir parce qu'ils 
avaient la tête brouillée par l'idée qu'il faut se méfier 
des enfants parce qu'ils sont des menteurs...

Écartelé entre le désir de sauver mes frères, et la peur 
du pire si je dénonçais Delay, ma mère et leur clique de 
pervers, j'adressais des messages confus que j'imaginais 
suffisamment clairs.
Le temps passait en mode survie. Tous les quinze 
jours, je devais retourner en enfer. Un jour, tout de 
même, j'ai fini par dire stop ! Oh ! Pas comme vous 
l'espérez. J'ai simplement pu dire :
- Je ne veux plus rentrer chez moi !
- Pourquoi?
- Je veux plus voir ma mère.
Incapable de dire les viols. Alors, une fois de plus, 
je suis passé pour un sale caractère.
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Autres billets sur le livre Je suis debout de Chérif Delay
2/ Autofiction, dans "Je suis debout" de Chérif Delay
3/ La responsabilité du suicide de l'un des acquittés d'Outreau
4/ La suite, je l'ai vécue comme pendant les viols. Dissocié. J'étais à la barre, mais totalement absent
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1 commentaire:

  1. Bravo Chérif pour ton courage.

    Je me reconnais complètement dans tes tentatives pour briser le silence et dénoncer l'emprise mortifère qu'ont exercé nos agresseurs sur nous.

    Comme toi,à l'adolescence j'ai essayé de dire l'impensable avec mes mots à moi,ce qui sortait péniblement de ma bouche et que je formulais sous forme de messages codés tellement j'étais terrorisée.
    Si on ne 'a pas vécu, il est difficile de comprendre l'état de sidération dans lequel on se retrouve après ces expériences de trauma tismes extrêmes qui nous ont littéralement plongés aux portes de la mort.Le cerveau et les sensations disjonctent.On devient un mort vivant, anesthésié, déconnecté de soi et de son environnement. Toute ma famille, des notables éffrayés pour leur réputation, se sont serrés les coudes dans le déni et ont essayé de me faire passer pour malade mentale et me faire interner.
    Dans mes pires heures de dépression et de maladie, j'ai pensé qu'i fallait que je tienne et reste en vie pour aider d'autres victimes.
    Devenue professeur, j'ai à nouveau été confrontée aux mêmes symptomes de dissociation,sidération et stress post traumatique chez des élèves victimes de viols dans leurs familles biologiques ou d'accueil.

    Il faut beaucoup de temps, Chérif, pour traverser ce terrain miné .La rage,la haine, le besoin d'être aimé, le désespoir, le désir de vengeance .on serait prêt aussi à accepter des miettes d'amour de nos bourreaux.
    Chérif, ce chemin, je l'ai fait.Mon mari aussi qui a eu un vécu, hélas, très proche du tien.
    Aujourdhui, je vais bien, sûrement parce qu'il s'est trouvé sur ma route diverses personnes pour me dire"je vous crois"," vous n'êtes pas folle".
    Tiens bon,Chérif.Nous sommes debouts, à tes cotés.Chemine avec les vivants, pas les morts qui ne peuvent rien t'apporter.

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