« Si un individu s’expose avec sincérité, tout le monde, plus ou moins, se trouve mis en jeu. Impossible de faire la lumière sur sa vie sans éclairer, ici ou là, celles des autres »
Simone de Beauvoir – La force de l’âge
« L’information est le seul bien qu’on puisse donner à quelqu’un sans s'en déposséder. »
Thomas Jefferson,
l’un des rédacteurs de la Déclaration d'Indépendance des États-Unis,

De l'esprit des lois (1748)

Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires.
Charles de Secondat, baron de Montesquieu

27 janvier 2000

Association Balise la vie - Nord-Pas-de-Calais

Association : CAP 2 (BALISE LA VIE).
No de parution : 20000013

Département (Région) : Pas-de-calais (Nord-Pas-de-Calais)

Lieu parution : Déclaration à la sous-préfecture de Saint-Omer.
Type d'annonce : ASSOCIATION/CREATION

Déclaration à la sous-préfecture de Saint-Omer.
CAP 2 (BALISE LA VIE).
Objet : à la lumière de l’expérience des intervenants des domaines judiciaires, psychologiques et sociaux : la prévention primaire (protéger les enfants et les adolescents d’une éventuelle effraction sexuelle dont ils pourraient être victimes ou auteurs) ;
la prévention secondaire (prévenir l’inscription traumatique et la reproduction transgénérationnelle des effractions sexuelles de manière directe ou indirecte) ;
mettre en place la promotion, la formation, l’organisation d’outils de prévention, d’une part, de thérapie, d’autre part, dans le contexte des agressions sexuelles.
Siège social : 18, place Jehan-d’Aire, 62120 Aire-sur-la-Lys.
Date de la déclaration : 27 janvier 2000.
Rendez-vous sur Hellocoton !

1 décembre 1999

Accompagnement et approches psychothératpeutiques du stress par Gérard Lopez

Dernière mise à jour : mercredi 1 décembre 1999

Stress, le mot connaît un succès croissant.

Mais dans les nomenclatures internationales, comme le CIM-10 par exemple, il figure comme Etat de stress post-traumatique (F43-1) et Réaction aiguë (F43-0). Ces troubles ont été abordés, ici, parmi d’autres, par M. Reynaud, comme troubles liés à des facteurs de stress pour le CIM-10 ou comme Trouble anxieux pour le DSM IV.

La pathologie psychotraumatique ne peut se limiter à un Etat de stress post-traumatique (ESPT), avec ou sans Trouble dissociatif (F44). Les Troubles de l’adaptation (F43-2) correspondent à la pathologie à laquelle les professionnels sont confrontés après "un changement existentiel important ou un événement stressant". En revanche, le CIM-10 distingue une Modification de la Personnalité après une expérience de catastrophe (F62.0) qui ne succède pas obligatoirement à un ESPT, mais qui peut aussi être considéré comme une séquelle chronique et irréversible de ce trouble.

L’impact d’un événements traumatique s’accompagnent évidemment d’une réaction physiologique de stress, mais c’est surtout une pathologie événementielle faisant effraction dans le psychisme et ne pouvant être élaboré. La répétition des événements traumatiques modifie la symptomatologie, entraînant des "hémorragies narcissiques" de plus en plus irréversibles, sans rapport avec le modèle du stress dépassé.

Le traitement des troubles psychotraumatiques — la psychotraumatologie - est une sorte de spécialité en soi, bien différente de la " Gestion du Stress ". L’International Society For Traumatic Stress Studies (ISTSS) la développe de façon rigoureuse.

Du point de vue thérapeutique, il faut se prémunir contre l'idée que les soins sont plus importants que le soutien social ou l'accompagnement judiciaire (Lopez et Sabouraud Seguin, 1998). Il faudrait, au contraire intégrer sa pratique dans un réseau de correspondants spécialisés dans l'accompagnement social et judiciaire. Tous les partenaires devraient apprendre à se connaître, à s'apprécier et à comprendre leur spécificité dans leur diversité et complémentarité : c’est l’objet de la victimologie, trop souvent confondue avec la psychotraumatologie. Le traitement d'une personne traumatisée psychique serait très difficile si la thérapie était "polluée", et elle le serait inévitablement, par toutes les embûches qui émaillent son difficile parcours.

On appelle survictimation ou victimation secondaire les conséquences des aléas qui aggravent l'état, en particulier psychologique, des traumatisés, lorsqu'ils sont confrontés à l'incompréhension de leurs proches, des autorités répressives, des instances professionnelles, sociales et autres. On ne peut entamer une psychothérapie qu’à l’issue, et uniquement à l’issue, de l'évaluation :

1) de l'impact traumatique sur le plan physique et psychologique ;

2) des conséquences sociales et familiales ;

3) des conséquences judiciaires.

Cette évaluation permet de mettre en place l’accompagnement social et judiciaire qui protège le cadre thérapeutique sécurisant.

Il convient d’utiliser des techniques validées par la communauté scientifique : l’ISTSS, pour l’essentiel. La reconnaissance de l'ESPT, dans les années 1980, aux Etats-Unis, a amené la réalisation de nombreuses études.

L’évolution spontanée de l'ESPT est de très mauvais pronostic, mais la recherche a permis le constat suivant :

1) l'évolution de l'ESPT est améliorée par une prise en charge psychologique ;

2) certaines approches sont plus efficaces que d'autres. Mais d'une façon générale, ces études sont encore assez difficilement exploitables en raison de :

  • absence d’entretien structuré standardisé validé
  • critères de sélection changeants selon les études
  • absence de groupe témoin ou de liste d’attente
  • techniques utilisées peu standardisées
  • confusion fréquente entre évaluateur et thérapeute
  • absence d’instruments consensuels pour mesurer les symptômes de l'ESPT
  • nombre insuffisant de participants
  • victimes trop ciblées (vétérans, viols)
  • suivi insuffisamment prolongé
  • non prise en compte des rechutes
  • association médicaments thérapies.

La plupart des recherches, d'origine américaine, concernent les techniques comportementales cognitives (TCC), la technique des mouvements oculaires rapides (EMDR) ou la pharmacologie. Quelques études ont cependant examiné les résultats obtenus avec les thérapies psychodynamiques. La plupart montrent une faible diminution des symptômes de l'ESPT (Lindy, 1987). Deux études particulières concernant une victime d’accident (Brom et Carlier, 1989) et un policier (Gersons et Carlier, 1994) montrent une meilleure efficacité.

Aucune étude n’a été réalisée avec des victimes présentant un lourd passé traumatique (traumatisme prolongé et/ou répétitif : maltraitance, tortures, violence d’Etat, emprise sectaire, etc.). Elles nécessitent des thérapies longues et difficiles : le pronostic est réservé.

Les traitements médicamenteux sont utiles, les antidépresseurs essentiellement.

Les psychothérapies d'inspiration psychanalytique sont l’approche habituellement proposée en France. Elle devrait permettre l’intégration de l’événement traumatique dans l’histoire du sujet. Il faut veiller à tenir compte de la demande du sujet de travailler sur l’événement traumatique même si, cadeau dans l’horreur, certains sujets entament un travail approfondi, dans un second temps.

Les thérapies comportementales et cognitives d’exposition, ont une efficacité évidente lorsque les conduites d'évitement, caractéristiques du ESPT, sont prédominantes.

L'hypnose, surtout lorsque la dissociation est le mécanisme de défense préférentiel, serait particulièrement efficace, malgré les résistances dont elle est toujours l'objet en France. Elle est contre-indiquée lorsqu'une procédure judiciaire est en cours en raison des risques de " faux souvenirs ".

L'E.M.D.R serait très efficace dans les suites immédiates d'un traumatisme psychique, notamment lorsque dominent un syndrome intrusif.

Les thérapies familiales ont un intérêt évident lors des traumatismes familiaux pour tenter de restaurer ce qui pourrait l’être.

D’autres méthodes, validées par la communauté scientifique, ont leur intérêt pour peu que l'utilisateur sache les maîtriser et qu'il ait l'expérience du traitement des traumatismes psychiques.

En fait, il semble, quelle que soit la méthode utilisée, il est nécessaire de respecter certains grands principes auxquels seule la psychanalyse conventionnelle ne saurait s'astreindre (mais elle est une méthode d'exception, rarement utilisée en première intention dans cette indication). Avec toutes les nuances possibles, il convient de donner la parole au sujet, dans un climat d'empathie actif, afin de lui permettre d'ordonner ses souvenirs pour donner un sens au traumatisme et lever, sans se hâter, le dispositif de défense dans lequel la " dissociation post-traumatique " paraît déterminante.
Pour lire la suite de l'article, cliquez sur le logo psydocFrance
______________________
Autres billets se rapportant au Dr Gérard Lopez :

1/ La fascination est une des armes qu'utilisent préférentiellement les pères incestueux par Gérard Lopez
2/
Définition de la victime
3/ Les pères incestueurs
4/ Quelques conséquences sur les survivantes
5/ Psychologie des vampires
6/ La responsabilité
7/ La cure des incestueurs
8/ Le recours à la loi pour les victimes

• L’indemnisation = argent « sale » rarement utilisée à des fins constructives en cas d'inceste
• Accompagnement et approches psychothératpeutiques du stress par Gérard Lopez
Rendez-vous sur Hellocoton !

17 novembre 1999

Barbara : Il était un piano noir…

Page 17
En revanche, je garderai longtemps le souvenir du mélange de fascination, de peur, de mépris, de haine et d'immense désespoir que je ressentirai lorsque je le retrouverai mort, à Nantes, vingt ans plus tard…

page 25
J'ai de plus en plus peur de mon père. Il le sent. Il le sait.
J'ai tellement besoin de ma mère, mais comment faire pour lui parler ? Et que lui dire ? Que je trouve le comportement de mon père bizarre ? Je me tais.
Un soir, à Tarbes, mon univers bascule dans l'horreur. J'ai dix ans et demi.
Les enfants se taisent parce qu'on refuse de les croire.
Parce qu'on les soupçonne d'affabuler.
Parce qu'ils ont honte et qu'ils se sentent coupables. Parce qu'ils ont peur.
Parce qu'ils croient qu'ils sont les seuls au monde avec leur terrible secret.

De ces humiliations infligées à l'enfance, de ces hautes turbulences, de ces descentes au fond du fond, j'ai toujours resurgi. Sûr, il m'a fallu un sacré goût de vivre, une sacrée envie d'être heureuse, une sacrée volonté d'atteindre le plaisir dans les bras d'un homme, pour me sentir un jour purifiée de tout, longtemps après.


page 42

Un après-midi, je fugue pour fuir mon père. Je n'en peux plus. Je marche, je marche, je marche. Je décide d'aller à la gendarmerie. Le gendarme m'écoute attentivement, j'ai même l'impression qu'il me croit. Mais il m'explique que je ne suis pas majeure et que je dois retourner chez mes parents !

C'est mon père qui vient me rechercher. Il laisse entendre que je suis une malade, une « affahulatrice ». Il me ramène à la maison, je le hais. Je suis punie pendant plusieurs jours, mais je sens que ma démarche l'a frappé.


page 49
Quand je suis petite, je suis déjà longue et maigre. Puis, à dix ans, rondelette ; à vingt ans, grosse d'avoir traversé tant d'avanie, comme pour me matelasser et me protéger contre celles encore à venir. Le chagrin ne nourrit pas, mais fait grossir.

page 57
Je suis partie pour Bruxelles en train afin de me rendre chez un cousin très éloigné qui, lors d'un passage « à Vitruve », m'avait laissé son adresse en Belgique. Il dirigeait un orchestre de balalaïkas et savait que je voulais chanter. Il m'a hébergée durant deux mois. Tandis qu'il me cherchait du travail, je faisais son ménage, tenais sa maison où il recevait beaucoup de monde, des gens qui ne me plaisaient pas du tout. Il me versait quelques sous. J'attendais. J'espérais.

Une nuit, je suis allée l'écouter. Ses musiciens arboraient de très amples chemises en satin rouge avec de larges manches très resserrées aux poignets. Ils étaient bottés de cuir noir. Lui, cheveux gommés, chemise de satin violet, botté de rouge : c'était le chef ! Je n'ai pas gardé un souvenir ébloui de cette soirée. Quelques jours plus tard, il m'a confié que jouer de la balalaïka était le versant artistique de sa vie. De l'autre côté, il avait des activités moins musicales, mais beaucoup plus lucratives.

Peu à peu, il est devenu méchant, brutal. Un après-midi, je me suis enfuie avec mes quelques sous, profitant de ce qu'il était absent.

Plusieurs jours durant, je me suis cachée ; j'avais très peur qu'il me fasse rechercher. J'ai toujours eu peur de qui porte un uniforme. Et peut-être encore plus peur de qui fait le même métier sans en porter.

Mais j'avais tort de m'inquiéter, ce n'était pas un angoissé, Sacha Piroutsky ! Jamais il n'a cherché à apprendre ce que j'étais devenue.


page 59

Je franchis donc le tourniquet de l'hôtel et fonce droit vers le portier. Je lui explique mon histoire, que je romance un brin. Il me questionne, me prie d'attendre puis revient, tout sourire. Je l'ignorais, mais il a toujours existé dans les palaces des « dames de luxe », des « femmes-divan » chargées du délassement des hommes d'affaires ou autres notabilités de passage. Le portier propose de me faire prêter de l'argent pour m'habiller, réparer « mon yeux », puis de m'installer dans une très belle chambre et, ma foi, vu que je n'ai pas l'air sotte…

– Merci bien, mais ce n'est pas mon truc…

Plutôt une petite chambre que je paierai plus tard, que je promets de rembourser très vite, ça oui…

Ce soir-là, je dors dans des draps après m'être détendue avec plaisir dans un bon bain. Merci, monsieur le portier ! La chambre est à mes yeux un palais.


Page 60

…/… Je signe des notes qui s'allongent. Au bout d'un mois, la direction de l'hôtel se manifeste très normalement. Le portier me réitère sa « très gentille proposition ». On commence à me refuser mes plateaux, puis mes cafés. J'ai faim.

Un soir, je descends dans la rue pour me prostituer. Ce n'est pas le malheur, le grand malheur ; mais c'est un grand chagrin.

Pour de l'argent, pour manger ou pour élever un enfant, par amour pour un « mec », pour payer sa « dope », rarement par vice, c'est ainsi que ça commence.

Ce métier-là, j'aurais aimé le faire comme un sacerdoce, un vrai don de soi. Donner de l'amour. Je l'ai écrit : Je suis une petite sœur d'amour, hop-là !… Etre petite sœur d'amour, chanter, prendre le voile, tout ça, c'est du pareil au même. Sauf que chanter, monter sur scène en pleine lumière, revêtue de son habit de scène, c'est faire montre d'un grand égocentrisme et d'une belle indécence.

Il est vrai que c'est toujours une chose merveilleuse que de gagner sa vie en faisant métier de ce que l'on aime. Longtemps, ça ne m'a pas plu de gagner de l'argent tout en chantant. Chanter, pour moi, c'était « prendre le voile », « sacraliser ». Après, j'ai mieux compris…

Page 105
Un taxi m'a conduite à l'adresse donnée par sœur Jeanne. C'est un café, au coin d'une rue. J'entre ; quatre hommes jouent aux cartes ; l'un d'eux s'avance vers moi, me prend doucement la main :
– Vous êtes la fille de Monseigneur ?
– Nous aimions beaucoup votre père.
Un homme à lunettes, monsieur Paul s'approche à son tour, un peu agressif. Longtemps ils me parlent d'un homme extraordinaire dont ils ne savent rien, sinon qu'il avait été rejeté par sa famille, qu'il avait eu quatre enfants qu'il aimait, une fille, surtout, qui chantait.
De quoi vivait-il ?
Où habitait-il ? Parfois il dormait dehors, mais il réapparaissait au matin, impeccable, pour entamer d'interminables parties de poker. Gai, généreux, gueulard, il ne croyait en rien, n'espérait plus rien.
– Jamais une plainte, confirme monsieur Paul. Pourtant, une fois qu'il avait un peu trop bu : « Je suis allé trop loin, c'est fini pour moi », aurait-il dit à monsieur Paul qui proposait de l'aider. Monsieur Paul raconte ; j'écoute, bouleversée, la vie de cet homme que je n'ai pas connu et dont je retrouve pourtant des traits de caractère. Je m'en veux d'être arrivée trop tard. J'oublie tout le mal qu'il m'a fait, et mon plus grand désespoir sera de ne pas avoir pu dire à ce père que j'ai tant détesté : « Je te pardonne, tu peux dormir tranquille. Je m'en suis sortie, puisque je chante ! » Peut-être a-t-il longtemps et partout traîné le souvenir et le remords de son crime ? J'apprends que les appels mystérieux reçus à la maison, quand on raccrochait chaque fois sans rien dire, c'était lui. La musique revient dans ma tête. Monsieur Paul dépose devant moi un vieux portefeuille, une paire de lunettes dont les verres sont rayés.
– Si j'avais su… , dit-il, oui, si j'avais su que vous étiez comme ça, je vous aurais quand même appelée, mon petit. Je l'insulte, lui crie que c'est nous qui avons été abandonnés, que ma mère a vécu un calvaire, que moi-même…
– Je comprends… , dit monsieur Paul qui ne peut pas comprendre mais qui a été si formidable.
– Pardonnez-moi. Vous avez bien fait de respecter ses volontés. Je vous remercie. De quoi est-il mort ?
– Un soir que la partie s'était prolongée tard, il a été pris, au moment de partir, d'une très violente douleur dans les reins.
J'apprends que, ne sachant pas où il allait dormir, il coucha, ce soir-là, chez monsieur Paul. Au matin, il refusa de voir un médecin, mais, la douleur persistant, il finit par accepter d'être transporté à l'hôpital. Comme on lui demandait où il fallait quérir ses affaires, il répondit en rigolant qu'il ne possédait que ce qu'il avait sur lui. Il mourut trois semaines plus tard, d'une tumeur cérébro-spinale, refusant même la morphine qui aurait adouci sa fin.
Merci, monsieur Paul !

Page 109
J'entre, ma mère est allongée sur le petit divan, les traits tirés, inquiète. - L'enterrement… C'était l'enterrement... Je tombe. Je raconte sans tout dire, sachant que l'apparente indifférence de ma mère masque un vrai chagrin. Mais je ne peux réprimer par moments mon agressivité, malheureuse de ne pas être aidée, comprise, et, tout à coup, je vouvoie ma mère ; je lui parle comme à une étrangère, peut-être pour pouvoir raconter avec plus de distance.
Elle ne comprend pas très bien ce qui se passe; aucune d'entre nous deux ne relèvera ce tournant, mais nos rapports seront à jamais changés sans que je puisse préciser clairement ces modifications. Je deviendrai sévère à l'égard de ma mère que j'ai toujours adorée, même si j'ai eu tant de mal à l'aimer. De son côté, elle manifestera envers moi, qu'elle dit indomptable, les premiers et timides élans d'une maman qui vient de découvrir son enfant. Elle deviendra elle-même mon enfant chérie que j'assumerai, protégerai toujours et du mieux que je pourrai.


Page 119
Vivre, je veux vivre avec la même violence que j'ai eue parfois à vouloir mourir sans vraiment mourir, à attendre la nuit pour m'y endormir bellement.

Page 122
Et toujours, les allées-venues de H… Il revient, il repart. Il m'écoute fredonner et propose de revenir définitivement si je ne chante plus. Jaloux. Possessif. Terrible. Il va se battre contre un piano, contre des chansons, contre un public peu nombreux mais qui constitue déjà ma raison de vivre.
Non, non et non !
Alors, séparation définitive.
Déchirure.
Rémusat de soleil et de glace.
Rémusat gris cendre…
Rémusat qui n'avait été aménagé que pour un seul amour mais qui revient trop tard, quand je n'en veux plus d'avoir eu tant mal, trop mal du temps d'amour.

Page 127
Le lendemain, on me parlera beaucoup de cette chanson. Elle sera longtemps source de confusion. On m'a souvent crue nantaise ! Non, je ne suis pas du tout nantaise ! J'ignore pourquoi mon père avait choisi cette belle ville pour y terminer sa vie. Plus tard, lorsque je partirai en tournée et que j'arriverai à une centaine de kilomètres de l'estuaire de la Loire, je serai prise d'une sorte d'étouffement. Il me faudra longtemps avant de pouvoir entrer calmement dans Nantes. Chaque fois, je vais au cimetière en cachette pour y déposer des fleurs. Ce n'est que beaucoup, beaucoup plus tard que je confierai aux journalistes la véritable histoire de Nantes.


Page 137
J'ai aimé la rencontre avec les hommes de ma vie, la dualité, la complicité, le rire, la quiétude, la séduction, l'impérieux besoin de reconquérir chaque matin, de rêver une vie à deux tout en sachant parfaitement que rien ni personne ne résisterait à mon piano, à mes théâtres, à la route partagée avec d'autres.
J'ai couru, attendu, retrouvé, perdu, aimé, aimé, heureuse, cruelle aussi, implacable souvent.
Cet état d'amoureuse, je l'ai presque toujours connu. J'en avais besoin pour chanter.
Dans ma vie de femme j'ai échoué.
Dans ma vie de mère j'ai échoué.
J'ai longtemps senti dans mon ventre un vide glacé, j'ai longtemps jalousé les femmes enceintes et détesté les nouveau-nés. J'ai souvent marché la main posée sur mon ventre.
Aujourd'hui, je pense que c'était sans doute le prix à payer et que ma vie a été malgré tout belle et intense.


Page 155
Ce séjour hospitalier m'apparaît comme une parenthèse de douceur. Je n'assume plus personne. Je me laisse porter ; sans culpabilité. J'ai envie d'écrire.


Page 167
D'ailleurs, le fou rire peut en un instant tout balayer, dédramatiser, ramener les choses à leur juste valeur – le problème, c'est qu'il lui faut trouver la place de se glisser dans mes colères. Or j'excelle à tout barricader, à m'enfermer à triple tour, à me rendre étrangère à mon interlocuteur qui me devient alors lui aussi parfaitement étranger ; je me mets brusquement à vouvoyer un ami et un complice de dix ans et plus, et je ne peux même plus imaginer que nous nous soyons fréquentés plus de cinq minutes dans toute notre vie. Ma colère, que je trouve invariablement justifiée, qui jamais ne résulte de quelque caprice, est toujours un moment où le paroxysme me porte, où une douleur ou une violence me tourmente à tel point que je m'y noie, hurlant à l'injustice, avec le sentiment de ne pas être entendue dans mon entière bonne foi et mon exigence de vérité.

Page 188
J'ai reçu tellement d'amour, tellement ! Et toute cette énergie qui m'a fait avancer, chanter, qui m'a permis de faire ce métier comme j'entendais le faire : en désobéissant, en refusant tous les archétypes, en ayant un instinct de préservation qui m'a toujours empêchée de me perdre dans le compromis, la confusion.

Joël JULY a publié en décembre 2004 aux PUP une étude sur le style de Barbara intitulée Les Mots de Barbara.
__________________
Autres billets sur Barbara
Barbara : Lecture analytique de l'introduction d' Il était un piano noir … – mémoires interrompus – de Barbara
L'aigle noir par Philippe Grimbert
"l'Aigle noir" ou l'impair d'un père par Philippe Grimbert
Les amours incestueuses interprétées par Barbara

Rendez-vous sur Hellocoton !

5 novembre 1999

Fausses allégations en matière d'inceste congratulations gluantes par Andrée Ruffo – juge à la Cour du Québec

Préface d'Andrée RUFFO
Juge à la chambre de la Jeunesse, Cour du Québec
Présidente du Bureau International du Droit des Enfants
Inceste, le piège du soupçon,
Éd. Belfond, 1999
Réflexion sur les allégations d'inceste au cours des divorces conflictuels.
Vous m’avez fait l’honneur, cher Docteur Bensussan, de me proposer d’écrire la préface de votre livre sur les fausses allégations d’abus sexuels. Je suis touchée de cette demande et heureuse d’y répondre, car je trouve ce livre non seulement courageux mais salutaire, et je suis convaincue que la justice sera vraiment rendue lorsque, tous ensemble, nous accepterons de collaborer, avec la pleine conscience que l’intérêt supérieur des enfants doit prévaloir dans toutes nos démarches et nos décisions.
Votre livre, en effet, nous fait prendre conscience de l’urgence qu’il y a à combler l’écart entre les grands principes prônés par la communauté internationale et la réalité quotidienne. À une époque où nous reconnaissons des droits de plus en plus nombreux aux enfants, désormais inscrits dans nos chartes et dans nos lois (193 pays ont ratifié la convention relative aux droits de l’enfant), ces histoires vécues d’enfants aux prises avec des abus sexuels, et des abus de pouvoir exacerbés par des conflits de loyauté, nous rappellent combien il est urgent de travailler ensemble pour développer une plus grande sensibilité à des situations rendues plus dramatiques encore par la vulnérabilité des victimes.
(...)
Vous avez eu, Docteur Bensussan, le courage de dire que tout n’est pas si clair, que la vérité est complexe, et que la recherche de celle-ci est une démarche demandant intégrité, compétence, et perspicacité. Le travail, tant des magistrats que des avocats, des psychiatres, des éducateurs ou des enseignants est délicat, exige attention, continuité, compassion, pour que puisse s’établir une relation de confiance, laquelle seule nous permettra d’approcher la vérité.

Vous avez avec justesse rappelé que l’on ne devait pas confondre sincérité et vérité. Le juge, pour rechercher la vérité, doit en effet prendre en compte la sincérité ou la bonne foi, parmi d’autres facteurs tels que la malice, l’intérêt, les jeux de pouvoir, les pathologies (bien qu’il ne relève pas de la compétence du magistrat de poser un diagnostic de maladie mentale).
Je suis également très touchée que vous ayez proposé à une juge canadienne de préfacer votre livre. Je suis touchée parce que, une fois encore, je réalise que l’ampleur des souffrances endurées par les enfants dépasse largement nos frontières respectives.
En tant que présidente du Bureau international des droits des enfants, j’ai eu l’occasion de rencontrer des magistrats partout dans le monde. Je les ai entendus relater des situations semblables à celles que vous décrivez, et exprimer avec beaucoup d’humilité et de franchise les difficultés rencontrées dans leur travail. Ensemble, nous avons parlé de nos limites, confessé notre impuissance, mais aussi réaffirmé notre foi dans l’avenir et dans ceux qui, comme nous, croient aux enfants.

Parce que vous avez choisi de nous parler de ces difficultés avec honnêteté, compétence, à l’aide d’exemples probants qui nous ramènent à nos propres sentiments, à nos propres limites, et à la grandeur de notre mission ; parce que vous avez osé dire ce que beaucoup gardent secret dans le silence feutré de leur officine, nous vous sommes infiniment reconnaissants, et vous disons combien nous apprécions cette démarche d’homme conscient de sa responsabilité.
Ce livre est un outil éducatif de premier ordre, un outil de sensibilisation et de partage, porteur d’espoir, et susceptible de générer un sens accru de responsabilité pour tous ceux qui, comme moi, ont à prendre chaque jour des décisions qui marquent la vie des enfants. Votre livre est audacieux, votre livre est bon, bon à lire, bon pour l’âme.

Votre livre est honnête et apporte l’espoir. Il nous rappelle la nécessaire vigilance que nous devons pratiquer vis-à-vis de l’application de lois qui, bien que reconnaissant les droits des enfants, restent souvent lettres mortes. Un monde juste permettra à chacun d’aller au bout de lui-même, d’accomplir sa destinée. Nos lois, nos conventions, nos décisions garantissent ce droit à chacun. Avons-nous emprunté les bons chemins ? Sommes-nous sur la bonne voie ?
_______________
Autres billets sur les fausses allégations ou faux souvenirs
Contre les fausses allégations : Ma vie en pièces détachées par Maritée préface de Muriel Salmona

18/ Il s'avère que c'est l'ingestion d'un médicament – l'amobarbital –, qui peut induire sous hypnose la construction des faux 
souvenirs, et non pas l'hypnose seule
19/ Le point sur les fausses allégations ou faux souvenirs par Marie-Christine Gryson Dejehansart
Au sujet des Faux Souvenirs ou fausses allégations
Rendez-vous sur Hellocoton !

Inceste, le piège du soupçon par Paul Bensussan

Broché
Paru le : 05/11/1999
Editeur : Belfond
ISBN : 2-7144-3693-5
EAN : 9782714436931
Nb. de pages : 190 pages
Poids : 270 g
Dimensions : 14cm x 22,5cm x 1,7cm
La vigilance en matière d'inceste et de pédophilie a désormais atteint un tel niveau qu'elle est en train de tourner à l'obsession collective, voire à la déraison.
Les spécialistes peuvent en témoigner : de nombreux parents s'interrogent sur la normalité des marques de tendresse qu'ils prodiguent à leur enfant. Mais l'omniprésence du soupçon peut conduire à des dérives plus malsaines encore, et l'on voit aujourd'hui de plus en plus de parents – souvent des pères – accusés à tort d'abus sexuels sur leur enfant. Or, les fausses allégations, qu'elles soient motivées par un soupçon légitime ou purement mensongères, ont un pouvoir de nuisance comparable à celui des incestes réels.
Par la peur bien compréhensible qu'elles suscitent, par le climat follement passionnel dans lequel elles surviennent, par la difficulté à démêler le vrai du faux, elles fonctionnent comme un piège aux conséquences toujours désastreuses. Un piège qui entraîne irrémédiablement des familles entières dans une escalade de violence et de haine. Un piège tout aussi redoutable pour les magistrats, les médecins et les experts qui ont à se prononcer dans ces affaires délicates.
Refusant de s'inscrire dans une dialectique manichéenne, Paul Bensussan propose ici, à partir de cas issus de son expérience clinique, une réflexion salutaire et des solutions destinées à venir à bout d'une terrible et moderne injustice. Destinées surtout à mieux protéger celui qui en est paradoxalement la première victime : l'enfant.
_____________________
Autres billets sur Inceste, le piège du soupçon

Rendez-vous sur Hellocoton !

27 octobre 1999

Stress et immunité : introduction par Jean-Michel Thurin

Histoire naturelle. Stress et facteurs déclenchants intervenant dans le processus morbide
Observations cliniques
mercredi 27 octobre 1999
Les deux premières observations sont issues d'un article de Paul Sivadon paru en 1955 dans L'Evolution psychiatrique (1).
La première concerne les conséquences psychosomatiques de la déportation, la seconde concerne les conséquences psychiques de maladies somatiques.
La troisième est issue d'un petit livre de J. Delay (2),
les deux dernières sont extraites du livre "Une vie sans soi" (3)

1) "Lorsqu'en 1945, nous revinrent les rescapés des camps d'extermination, j'eus l'occasion de suivre, à titre prophylactique et pour tenter de faciliter leur réinsertion sociale, un certain nombre d'anciens déportés. Au cours des mois qui suivirent et sur une période d'environ trois années, les faits suivants s'imposèrent à mon observation.
Après quelques semaines d'euphorie, la plupart d'entre eux présentèrent une lassitude intense s'accompagnant chez beaucoup de troubles du sommeil. Pour certains, c'était une appétence de sommeil toujours inassouvie ; ils dormaient douze heures et restaient las tout le jour, s'endormant à nouveau au cours de la journée. Pour d'autres, c'était une insomnie nocturne avec souvent, au cours de la journée, des crises de sommeil rappelant la narcolepsie.
Presque tous, après quelques mois, commencèrent à manifester des phénomènes d'intolérance alimentaire : ils accusèrent leur foie surmené par les écarts de régime qui avaient suivi leur retour.
Puis apparurent des phénomènes d'intolérance sociale : ils ne pouvaient plus supporter l'entourage familial et professionnel qui étaient le leur avant leur arrestation. A peu près tous changèrent de profession. Plus de la moitié rompirent, au moins transitoirement avec leur famille et leurs amis les plus chers. Beaucoup divorcèrent. Cette intolérance sociale de plus en plus diffuse se traduisit chez le plus grand nombre par une instabilité foncière et par des manifestations caractérielles gênantes pour leur entourage.


Beaucoup, particulièrement dans la deuxième année qui suivit le retour, se mirent à absorber des boissons alcoolisées à des doses qu'en d'autres temps ils n'auraient pu supporter.

Puis, vers 1947 et 1948, certains se stabilisèrent, ils se mirent à rêver des scènes dramatiques qui, peu à peu, ressemblaient davantage à leurs propres aventures et tout rentra dans l'ordre. cCrtains restèrent simplement sensibilisés à certaines situations et à certains personnages (contraintes, attentes, policiers, etc…) sensibilisation qui persiste encore, après 10 ans, se manifestant par une véritable intolérance anaphylactique. Chez d'autres, vers la deuxième ou troisième année de leur retour apparurent des manifestations névropathiques variées (céphalées, subanxiété, algies diverses) suivies, à l'occasion d'un choc émotionnel minime ou parfois d'une grippe banale, d'une névrose caractérisée." Ce cas présente le processus d'apparition d'un syndrome post traumatique et ses caractéristiques cliniques.

(1) SIVADON P., Phénomènes d'intolérance et mécanismes allergiques en pathologie mentale, L'Évolution psychiatrique, 11, avril-juin 1955, pp 299-326.
(2) DELAY J., "La psychophysiologie humaine" , Collection "Que sais-je ?"
(3) THURIN JM., Une vie sans soi, Ed Frison-Roche, 1996, 240p
Pour lire la suite de l'article, cliquez sur le logo de Psydoc
Rendez-vous sur Hellocoton !

9 décembre 1998

Oncle "G" : le silence de l’enfant et le passé imposé par Tootsie Guéra

Tootsie Guéra Ecrivain, journaliste
Lecture par Sophie Jaussi en ouverture d’un passage du livre en cours d’achèvement « Le Passé imposé » sur le fait de dire.
« Les années passent et un matin on se réveille en pleurant des larmes d’enfance Un jour on ne peut plus. Quelque chose bouillonne, la vérité prend la place du flou, quelque chose se met à la place de nous, nous l’endormie, la morte, quelque chose vit, nous prend la place de nous. J’avais fait un arrêt sur image, un jour l’arrêt en a assez, il a terminé sa programmation, il repart en image, précise, sans faille, comme si on l’avait faite sur mesure. Dès que l’on met l’accent sur une première image, tout arrive, on ouvre des portes, comme dans les anciens calendriers de Noël. Des portillons. Tout se précipite aux portillons. Submergée d’images, de sensations. On ramène du large, dès que l’on pense qu’une image a livré ce qu’elle avait à livrer, dix autres surgissent. Les images reprenaient leur place sans sourciller. Prendre conscience n’est pas un vain mot. Mais il faut gérer, on n’a pas appris à gérer. Tout explose. Le faux que l’on a placé sur le vrai explose. Le vrai ne sait plus où il en est, il s’est trop protégé derrière le faux, il fait bien chaud derrière le faux, c’est si douillet. Le vrai est au grand jour. Froid, nu, insupportable. Notre corps, notre cœur nous crie « menteuse ». Pas menteuse comme le disent les autres, pas menteuse d’inventer une chose monstrueuse, menteuse parce que l’on s’est menti à soi-même. Il y a eu masque, lorsqu’on le retire, il est là depuis si longtemps, on s’arrache la peau, on s’arrache la protection peau. Ce qui s’appelle en esthétique un peeling. On l’a placé si parfaitement, on l’a fait si parfaitement adhérer à l’autre peau, on a fini par oublier qu’il y avait une autre peau. Ce qui apparaît est sanguinolent, la peau protection pleure au grand jour, la menteuse se remet dans sa vérité. On a envie de cacher le vrai, de retrouver le cocon du faux. Nous sommes des déviées, des déviées du départ. « Ceux qui ne connaissent pas leur histoire s’exposent à ce qu’elle recommence » a dit Elie Wiesel. »

Pour me situer : je suis une émigrée de l’enfance. Du silence de l’enfant. Je suis partie de Suisse à vingt ans. Je ne brisais pas le silence, je contournais, je brisais mon origine. J’aime faire mienne une phrase de Colette : « j’appartiens à un pays que j’ai quitté ».
Je n’apporte pas un témoignage. Je ne suis pas une « témoigneuse ». Simplement mon cas est celui que je connais le mieux. De là a pu se faire une réflexion. Plus tard un livre. Avec des mots. Il y a le sujet, et il y a les mots. Eux savent vaincre le silence du sujet.
Un soir de neige, en Suisse. Un anniversaire de ce second mari de ma mère. Soirée en copains, fondue. Nuit et neige. J’ai tant aimé plus tard le film Nuit et brouillard. Un inceste de deuxième type. Je disais « mon papa » en parlant de lui dans mes cahiers d’écolière. Une nuit sans paroles. Pas de phrases telles que : « Ne dis rien sinon… » Un film muet. C’était l’heure où les enfants dorment. La nuit la plus silencieuse de ma vie. Son silence, puis le mien. Pas de viol. Viol moral c’est tout. Il y avait surtout le pouvoir. L’horrible impression ensuite pendant les quatre années qui ont suivi d’un pouvoir absolu. Entré dans la chambre pour recouvrir mon petit frère, son bébé d’un an et demi, il m’avait découverte en passant. Jeu ? Il se livrait à des gestes sans nom particulier sur un corps de petite fille de onze ans et trois mois. Attouchements sexuels dit-on plus tard. Vague, flou, pour cette nuit-là. Joujou sexuel, sex toy. Nous avons un sexe avant de le savoir. Des années plus tard, j’ai compris, il se masturbait de sa main libre. On se trouve alors face à soi. Peut-être pour la première fois de sa vie. Interrogation et silence. Les enfants tués disparaissent de la vie. On disparaît de la vie aussi, mais personne ne s’en aperçoit.
Le silence de l’enfant est peut-être le plus grand malentendu entre l’enfant et l’adulte. « On n’a rien vu » disent les adultes qui ont été proches d’un drame. « Parce qu’elle n’a rien dit, pourquoi n’a-t-elle pas dit ? » L’adulte ne serait pas fait pour voir, pour observer, où est son don d’observation ? Et en plus les adultes ont oublié de faire des mots pour ce sujet-là. Comment parler sans mots ? Inventer des mots ? C’est à l’enfant de gérer, et non à l’adulte. Il tourne le dos aux mots non dits. Lorsque les mots ne sont pas dits, les actes seuls existent. Ils prennent toute leur puissance sans le secours des mots. Ils se cloîtrent sur eux-mêmes.
Les adultes ont des ornières « il fallait le dire avant ». Avant quoi ? Qu’est-ce que cela veut dire « dire avant » pour un enfant, avant que cela ne se produise ? Il y a cette faille : on voit un enfant abusé comme un enfant non abusé. On pense que la respiration est la même, que le pouls bat de la même façon, l’enfant peut être en apnée, donc ne peut même pas pleurer. Après on dit il l’a violée, après, lorsque les années ont passé, elles disent il m’a violée. Il y a eu abus, il y a eu attouchements, mon beau-père m’a ennuyée la nuit. Mais sur le moment, connaissaient-elles, connaît-on le mot violer, le mot attouchements, abus ? On ne dit pas : « il a abusé de moi » ce que tout le monde comprendrait. Mais on ne sait pas dire cela. Quoi ? Il m’a caressée ? Non, une caresse, sur la joue, sur la main, est un geste doux, rassurant. Là, un geste doux ? Un geste rassurant ? Même il m’a touchée. Non, toucher ne se centralise pas sur un endroit du corps, ou deux endroits si une poitrine naissante a trouvé sa place elle aussi sous cette main d’homme. Toucher a des sens plus larges, moins précis. On n’a pas fait des mots pour dire. Pourquoi, et comment dire, et avec quels mots, pourquoi dire si c’est pour ne rien dire. Le manque de mots s’appelle silence.
On sombre dans un autre monde. On se blottit dans l’incertitude. C’est encore ce qu’il y a de plus rassurant. On a dû se tromper en ayant peur, en ayant mal. Il vaut mieux se taire alors. C’est de notre faute. Ce qui se comprend mal s’énonce mal. Et si l’adulte avait raison ? Et si l’on était ridicule de trouver cela anormal ? L’enfant a si peur du ridicule. J’avais mal interprété la vie. La personne à qui nous parlerions pourrait en rire. Il y a eu d’autres choses dans tous les jalonnements si particuliers, et normaux. Un jour on nous a mis dans une poussette et non plus dans un landau, puis on nous a mis sur nos jambes et il fallait s’y tenir. Un jour on nous a donné le biberon et non plus le sein, un jour on nous a donné à manger avec une fourchette et non plus avec une cuillère. Est-ce que ce n’était pas aussi incongru ? Mais c’était fait en principe par quelqu’un que nous aimions, du moins par un adulte, l’enfant suit l’adulte, la confiance guide. Un jour on nous a fait des piqûres, des vaccins, chez un médecin, était-ce anormal ? Un jour la mère, ou le père, ou le beau-père, ou une autre personne de la famille, nous a conduit chez le dentiste. C’était désagréable, mais normal, apparemment, et un adulte nous guidait. J’avais fini par penser, en réfléchissant ensuite, en tournant les choses dans tous les sens dans la première nuit d’insomnie de ma vie, que c’était normal, comme aller chez dentiste, que cela se faisait à toutes les petites filles. Il y avait peut-être cela dans cette progression, et on ne le savait pas. Ou c’était une punition, j’avais laissé traîner mes bottes de neige, je n’avais pas fermé la porte d’entrée en bas. Il semble bien y avoir chez l’enfant la notion de mériter, en bon, en mauvais. Mériter une récompense, mériter une punition. Puis j’ai pensé qu’il y avait eu un pari. Peut-être d’ailleurs qu’un des autres hommes présents, père d’une petite fille de mon âge, lui avait fait la même chose. Mauvaise piste, la petite fille ne dormait pas chez son père cette nuit-là, ses parents étaient divorcés, elle vivait chez sa mère.
J’ai espéré le matin que l’on me parlerait, à la maison. Un silence serait rompu, pas par moi, par les adultes. Quelqu’un m’expliquerait. Peut-être même le beau-père en question. Rien, leur vie à eux ne semblait pas du tout modifiée. Le vrai silence ne vient qu’après. A partir de là pour moi. J’entrais dans une nouvelle phase de vie. La construction est interrompue. La reconstruction est pour plus tard ou pour jamais. On ne nous a pas donné des éléments de reconstruction dans notre berceau pour palier au silence.
Il y a eu quelques percées de ce silence. J’ai « dit » à la jeune employée de maison, Italienne. Elle avait dix-sept ans. Je me suis demandé quel mot j’utiliserais. J’ai utilisé le mot toucher : « Oncle G m’a touché le derrière. Avant-hier soir. Après la fondue. » On appelait en Suisse à ce moment-là, ou dans ma famille, un devant derrière. On disait : « cache ton derrière ». Elle était affolée, angoissée, blanche, verte. Elle a donné son verdict : « Surtout ne dis rien, tu irais en prison, parce que c’est un Monsieur. » Elle me protégeait. Elle protégeait le silence. Elle le faisait passer dans un niveau plus définitif, officiel.
Puis j’ai parlé à ma grand’mère, mais j’avais déjà démystifié les mots. Je parlais à demi-silence. « Je crois qu’il a soulevé ma chemise de nuit en me recouvrant. » Elle a abaissé la conversation : « Mais non, cela arrive en recouvrant un enfant ». Elle ne pouvait même pas imaginer. Les personnes normales ne peuvent imaginer et se rangent elles aussi au silence.
Troisième trouée, plus tard, à vingt ans cette fois-ci, en partant de « la maison » pour cause d’enfance. Nous étions dans ma chambre, ma mère et moi. J’avais eu « ma » chambre après un an de pensionnat. Ma mère vantait les mérites de son mari – en décidant de partir je m’étais contentée de parler de sa sévérité – il était peut-être un peu sévère, mais j’étais injuste, ingrate, il m’avait élevée. – Élevée vers quoi ? – J’ai dit, enfin. Le silence brisé a été puni, j’ai reçu ma lampe de chevet sur la tête. Puis dans le bureau de son mari, rempli de fusils, devant lui parlant d’appeler « le juge d’instruction », elle a protégé le présent. « Tu t’es trompée, c’était ton grand-père. » Ce dernier n’a pu sortir de son silence, il était mort depuis quatre ans. Je l’ai rejoint, pas dans sa tombe, mais dans son silence obligé.

Au fil des années, des maux d’enfance, ces maux découlant des mots retenus, ont fait leur apparition. Jacques Salomé m’en a parlé, au cours d’une de nos rencontres : « Je le dis par une périphrase : « lorsqu’il y a le silence des mots se réveille la violence des maux. Ce qui se passe est une recrudescence de la violence sur soi, des maladies, des accidents, de la drogue. » J’ai appris ces dernières années, à travers mon métier de journaliste surtout, en parlant d’une médecine différente, à considérer l’être humain comme une chose holistique, nous ne sommes pas faits de pièces détachées. Pour moi le silence avait fait ses dégâts. Personne ne percevait mes appels de détresse, les mots maux de mon corps. Je me suis exprimée de cette façon-là dès lors. Mon corps parlait sans moi. On appelait le médecin au moindre problème, dans cette famille bourgeoise. On me soignait. On soignait les dégâts du silence.
Il y eut avant tout des angines à répétition. Selon Michel Odoul, dans son livre (Dis moi où tu as mal – Le Lexique – Plus de 300 pathologies ou traumatismes décodés, Albin Michel 2003) nous avons « quelque chose en travers de la gorge, que nous avons du mal à avaler, ou que nous avons du mal à exprimer. » « Parfois les deux » précise-t-il. « La faute en revient à l’« autre ». Qu’a-t-il fait ou dit que nous n’arrivons pas à dire ? »
Dans ce même temps j’accumulais les « indigestions ». « Nous ne voulons pas garder dans (sur) l’estomac ce qui ne nous convient pas. » Des aphtes s’installaient. Toujours selon Odoul : « La bouche est ce qui nous permet de nous nourrir et aussi de nous exprimer. » C’est la porte ouverte entre le monde extérieur et intérieur. Les maux de bouche sont autant de signes que ce que l’on nous propose ou que nous disons ne nous satisfait pas. « Tous ces maux peuvent signifier que l’éducation qu’on nous donne, ou que les expériences que nous rencontrons, ne sont pas de notre goût. »
C’était la période aussi où je me tordais les chevilles. On m’envoyait chez le « rebouteux » du village voisin. Il soignait les silences du pied. J’ai été ahurie en lisant que les entorses, dans le langage de Michel Odoul, signifient que nous traversons une phase dans laquelle nos positions, nos critères de vie, la façon dont nous nous plaçons officiellement par rapport à l’autre ne conviennent plus, ne nous satisfont plus et que nous avons de la difficulté à en changer, à bouger. « Ces positions manquent de souplesse et de douceur, de stabilité ou de réalisme. Nous nous obligeons alors à l’arrêt, car nous ne pouvons plus continuer, avancer dans cette direction. »
Un peu plus tard apparut un grand épisode verrues. Sur les mains surtout. J’en avais compté vingt deux. « Cette particularité est loin d’être bénigne car elle donne le niveau précis de ce qui bloque. Les verrues sont en effet des fixations, des indurations de mémoire émotionnelles. Elles apparaissent souvent chez des enfants et des adolescents. » « Elles nous parlent, continue l’auteur, de choses figées en nous, de contrariétés en rapport avec les interdits, des empêchements à faire (mains) ou à être (pieds). Elles signent la sensibilité de la personne et son incapacité à exprimer son ressenti. »
Plus tard encore, j’étais partie de la maison, une salpingite s’est manifestée, de façon aigüe. Voix d’Odoul : « C’est une inflammation aiguë ou chronique d’une trompe utérine. Elle touche donc le lieu du corps féminin qui permet à l’œuf de parvenir dans l’utérus et de nidifier. L’état inflammatoire signe la présence d’émotions négatives rentrées comme des colères, des amertumes ou des rancœurs. Le fait que cette inflammation siège à cet endroit précis nous parle sans doute de tensions, de difficultés à laisser l’enfant trouver sa place en nous, à nous laisser créer, entreprendre. Cette difficulté est due à un état émotionnel non avéré, non accepté et non reconnu. » J’avais bien étouffé, mon cerveau avait apparemment accepté d’oublier, ma trompe gauche non. Le médecin qui m’a opérée m’a dit que je n’aurais pas d’enfants. La trompe droite s’est arrangée pour démentir la sentence. Elle s’est exprimée. Elle a refusé de se taire. Elle a vaincu le silence. J’ai eu deux petites filles.

Ensuite dans mon parcours personnel se sont succédées les étapes, conduisant un jour à « dire ». Une première étape à Neuchâtel, ma ville d’enfance, où je me trouvais pour un repérage. La chambre d’hôtel m’a replacée arrière sans crier gare. Le silence est sorti de son enfermement. Peut-être une propreté blanche en cause, le lit très blanc, gros duvet bien mis en forme, comme cela se faisait le matin à la maison lorsque j’étais petite. A peine la lampe de chevet éteinte je ressentais une impression de peur, insupportable, insurmontable. Elle ne se raccrochait à rien, même pas au rien de la crise d’angoisse, de panique. Je disparaissais derrière elle. Je la reconnaissais sans pouvoir l’identifier immédiatement. Je savais qu’elle avait existé en moi. Tout à coup je ne possédais plus mon statut d’adulte. Le subconscient ne fait pas la part des choses, dit-on, n’a pas la faculté de raisonner.
Puis plusieurs années après, autre étape, un mot de ma mère au téléphone. Bien bien après la chambre et la lampe de chevet. Elle m’a dit : « Tu te laisses tout faire. » Parce que j’avais à ce moment-là quelques problèmes d’argent, seule avec mes enfants. Je ne m’étais pas défendue au moment du divorce, je ne savais pas encore me défendre. Je pensais que dans tout ce qui m’arrivait je devais me débrouiller, moi. D’où, de quel subconscient endormi, prenait-elle ces mots ? Cela a provoqué le déclic définitif, la fin du silence.

Le passé imposé est la résurgence d’un passé imposé, mais est aussi un présent qui en découle, un passé imposé remis à neuf. La suite, l’aboutissement direct du silence. Lorsque, enfin, on parle, on entre dans le vif du sujet. On croit gommer par des mots, des sensations ressurgies. Il faut bien faire le vide. Le vide pour faire du plein, un plein meilleur. Enfin on dit, enfin on brise le silence. Le silence brisé nous brise. Le vide reste très vide. On retombe arrière, on retombe en enfance. Faire un livre. Mon cas. Aucun problème, je serais protégée par l’alchimie de l’écriture, le choix d’un mot, d’une couleur, la musique des mots. Je me protégeais derrière la formule de Barthes : écrivain ou écrivant. Dire pour écrire. L’écrivain dit pour écrire, l’écrivant écrit pour dire. Je serais l’écrivain exclusivement, peu importait le sujet. Mots pour dire. Le reste ne serait que prétexte. Tout était si lointain, avec un tel recul ce serait « il était une fois ». Belle protection, je devenais écrivant, je passais dans la douleur, je passais d’un statut à l’autre. Comme si j’avais changé de costume de scène. L’écrivant sortait de ce cocon pour pleurer à l’air libre.
Puis lorsque l’on relève la tête de ce long travail intérieur, que l’on piétine le silence, commence un autre trajet. La solitude du coureur de fond, la pire des solitudes. On affronte le vrai air libre. Ce n’est même pas être seul c’est être glacé, comme sans vie. C’est se retrouver dans la faiblesse et non plus dans la force, si l’on a les deux en nous. On devient l’épouvantail, selon Boris Cyrulnik. C’est là que l’on nous dit : « Mais tu n’avais rien dit, mais pourquoi ? » On sous-entend parfois : « En fait elle aimait bien ça… » Il faut expliquer la honte, l’angoisse, le silence pas en silence mais en prime de l’horreur.
Puis, en cas de livre, il y a les refus d’éditeurs, de belles lettres : « On aime beaucoup mais » et le mais n’est jamais le même. « Pas de collection correspondant à ce sujet. » Le sujet effraie. Au moment où l’on voudrait se sentir aimée, comprise. Un jeune éditeur me dit au téléphone – il a lu, trouve intéressant – mais : « Ce n’est pas assez sale, trop suisse, trop bien élevé. » On écorche bien les écorchées d’enfance. Et, apothéose, lorsque le livre a été publié, en Belgique où je vivais alors, s’est manifestée la famille au grand complet. Elle est sortie de son silence elle aussi. A crié l’innocence. Le silence est plus dense lorsque tout est « fait maison » parce que tout est plus perturbant que s’il s’agit d’un étranger. Et plus tard les retombées aussi prennent des proportions plus intenses lorsque les produits faits maison ressortent de leur grenier. La rupture du silence est pire. Elle touche des proches et non des êtres abstraits. Les proches ont la faculté de hurler, de réfuter. Le coupable devient la victime. Enfin. On a simplifié dans ma famille : « Elle a inventé tout cela pour se faire du fric. » On nous repousse. On meurt même sans nous. Ma jeune sœur, enfin demi-sœur, est morte. Un cancer à l’âge de vivre. Plus de place pour moi, dans ce silence vaincu, même pas sur les faire-part. Ma mère était morte d’un cancer, bien avant la sortie du livre. Mon père est mort, il ne faisait pas partie de la famille, mais il est mort. Je les ai tous tués, ai-je ajouté à mes listes de culpabilité. Très peu de temps, je commençais à avoir droit à moi-même. La rupture du silence commençait à porter ses fruits. Je commençais à oser dire non au fond de moi. La révolte suivait. Plus encore lorsque ma mère, d’outre-tombe – un testament écrit un an avant sa mort – m’a déshéritée d’une partie de ce qui me revenait, pour le donner à son mari, comme cela peut se faire en Suisse.
Petit à petit j’ai survécu, au plein sens du mot, au-dessus du silence capté. Restait peut-être quelques douleurs intérieures. Des bribes de silence. Encore un noir, une interrogation. J’ai fait un rêve. Une petite fille me tend un bras, elle dit : « Aime moi. » Je suis médusée de tant de simplicité. Ce tout petit bras, si frêle, tellement plein d’amour. Puis je me reconnais, moi à onze ans. Je ne me suis plus aimée ? J’ai abandonné moi aussi cette petite fille ? On se sent tant dans la culpabilité que l’on ne s’aime plus, juste au moment ou plus personne ne nous aime. Elle rompt ce dernier silence enfoui. Je tends un bras moi aussi, je retrouve, l’amour redevient double.
Au fil des mois, après la sortie du livre, j’ai capturé l’autre versant, le contre-silence On m’a dit à tout moment « merci ». Dans des lettres, après des débats. On m’a dit : « grâce à vous j’ai pu parler, enfin. » Enfin je refaisais du plein. Les silences domptés ont cette force-là : se propager doublement. Ne pas être inutiles. Il y a enfin échange. Cela laisse des traces, un sceau, un tampon.
Lui, beau-père de deuxième type, va bien paraît-il. Il a quatre-vingt treize ans. Son silence, ou ses défaillances de mémoire, ne tuent pas. Le manque d’émotion ne tue pas. Le seul silence qui conserve bien.

Nota Bene : La Suisse vient d’obtenir, par un vote national, l’imprescriptibilité dans le monde de l’inceste, de la pédophilie. Le silence va défleurir. La parole sortira des greniers, des caves, des lits d’enfance de nuit muette.
Rendez-vous sur Hellocoton !

16 octobre 1998

1/ Amin Zaoui – La soumission

Broché
Paru le : 16/10/1998

Editeur : Rocher/Serpent à plumes
Collection" : fiction domaine francais
ISBN : 2-84261-080-6
EAN : 9782842610807
Nb. de pages : 151 pages
Poids : 200 g
Dimensions : 13cm x 20,6cm x 1,1cm

Feu bleu du ciel de l'Oranais, feu jaune des vents brûlants, feu roux du henné qui colore les cheveux, les mains et les pieds, feu de désirs contenus, réprimés, et pourtant savamment entretenus comme des braises par la poésie des vers coraniques.
En un huis-clos étouffant, celui d'une famille aux filiations incertaines, Amin Zaoui dépeint les ravages et la violence de la soumission ancestrale des femmes à leur mari, des enfants à leurs parents : où le feu des désirs appelle le sang de la mort et annonce les désastres.
_____________________________
Autres billets sur La soumission d'Amin Zaoui

2/ Khokha avait quitté Khokha
Rendez-vous sur Hellocoton !