Les violences sexuelles sont à l'origine de graves conséquences sur la santé mentale et physique directement liées à l'installation de troubles psychotraumatiques sévères qui, s'ils ne sont pas pris en charge spécifiquement, peuvent se chroniciser et durer de nombreuses années, voire toute une vie.
Ces troubles psychotraumatiques sont très fréquents lors de violences sexuelles, avec 80 % de risque de les développer en cas de viol (alors que lors de traumatismes en général il n'y a que 24 % de risques). Ce sont des conséquences normales des violences. Ils sont pathognomoniques, c'est-à-dire qu'ils sont spécifiques et qu'ils sont une preuve médicale du traumatisme.
Ces troubles psychotraumatiques sont méconnus presque jamais identifiés, ni diagnostiqués (les médecins, les psychiatres ne sont pas formés), les victimes sont abandonnées sans traitement spécialisé. Tout se passe comme si on laissait un polytraumatisé après un accident se réparer tout seul sans soin, au pire il pourrait en mourir, se retrouver le plus souvent avec de lourdes séquelles et de lourds handicaps, et au mieux s'en sortir à peu près, mais après quelles souffrances ! C'est ce qui se passe pour les victimes de violences sexuelles alors qu'elles sont polytraumatisées psychiquement et neurologiquement on les laisse sans soin, alors qu'il existe des soins efficaces. C'est inhumain. Et comble de l'injustice, on leur reproche sans cesse leurs symptômes et leurs handicaps.
Ces troubles psychotraumatiques sont générés par des situations de peur et de stress extrêmes provoquées par les violences. Ces violences sexuelles sont tellement terrorisantes, sidérantes, incompréhensibles, incohérentes et impensables qu'elles vont pétrifier le psychisme — le mettre en panne — de telle sorte qu'il ne pourra plus jouer son rôle de modérateur de la réponse émotionnelle déclenchée par l'amygdale cérébrale qui joue un rôle d'alarme en commandant la sécrétion d'adrénaline et de cortisol (hormones de stress). La réponse émotionnelle monte alors en puissance sans rien pour l'arrêter et atteint un stade de stress dépassé qui représente un risque vital cardio-vasculaire (adrénaline) et neurologique (cortisol) par "survoltage" et impose la mise en place par le cerveau de mécanismes de sauvegarde neurobiologiques exceptionnels sous la forme d'une disjonction. C'est un court-circuit qui isole l'amygdale cérébrale et qui permet d'éteindre la réponse émotionnelle. Cette disjonction se fait à l'aide de la libération par le cerveau de neuromédiateurs qui sont des drogues dures endogènes morphine-like et kétamine-like.
La disjonction entraîne une anesthésie émotionnelle et physique alors que les violences continuent et elle donne une sensation d'irréalité, de déconnexion, de corps mort, de n'être plus dans la situation, mais de la vivre de l'extérieur en spectateur, c'est ce qu'on appelle la dissociation. La dissociation peut parfois s'installer de manière permanente donnant l'impression de devenir une automate, d'être dévitalisée, déconnectée, anesthésiée, confuse, une morte-vivante.
La disjonction est aussi à l'origine de troubles de la mémoire (amnésie) et d'une mémoire traumatique, la mémoire émotionnelle des violences va rester piégée dans l'amygdale, isolée elle ne pourra pas être traitée par l'hippocampe (structure cérébrale qui est un logiciel de traitement et d'encodage de la mémoire consciente et des apprentissages). Cette mémoire traumatique va alors rester en l'état, surchargée d'effroi, de détresse, de douleur et exploser ensuite à distance des violences de manière incontrôlable au moindre lien ou stimulus qui rappellent les violences (situations, lieux, odeurs, sensations, émotions, stress, etc.). Elle fait revivre à l'identique, de façon intolérable les violences avec les mêmes émotions, les mêmes sensations, le même stress dépassé lors des réminiscences ou lors de cauchemars. Elle envahit totalement la conscience et provoque une détresse, une souffrance extrême et à nouveau un survoltage et une disjonction.
La vie devient un enfer avec une sensation d'insécurité, de peur et de guerre permanente. Il faut être dans une vigilance de chaque instant pour éviter les situations qui risquent de faire exploser cette mémoire traumatique. Des conduites d'évitement et de contrôles de l'environnement se mettent alors en place. Toute situation de stress est à éviter, il est impossible de relâcher sa vigilance, dormir devient extrêmement difficile.
La vie devient un terrain miné par cette mémoire traumatique qui est tout le temps susceptible d'exploser en se rechargeant encore plus à chaque fois, et en créant au bout d'un certain nombre d'explosions une accoutumance aux drogues dures endogènes disjonctantes. À cause de cette accoutumance, l'état de stress dépassé avec survoltage ne peut plus être calmé par la disjonction, la souffrance devient intolérable, avec une impression de mort imminente. Pour y échapper il n'y a plus comme solution que de recourir au suicide ou à des conduites dissociantes, c'est-à-dire à des conduites qui augmentent brutalement le niveau de stress pour arriver coûte que coûte à sécréter suffisamment de drogues dures endogènes (pour disjoncter malgré l'accoutumance), ou qui renforcent l'effet des drogues endogènes grâce à une consommation de drogues exogènes (alcool, drogues, psychotropes à hautes doses).
Ces conduites dissociantes sont des conduites à risques et de mises en danger : sur la route ou dans le sport, mises en danger sexuelles, jeux dangereux, consommation de produits stupéfiants, violences contre soi-même comme des auto-mutilations, violences contre autrui (l'autre servant alors de fusible grâce à l'imposition d'un rapport de force pour disjoncter). Rapidement ces conduites dissociantes deviennent de véritables addictions. Ces conduites dissociantes sont incompréhensibles et paraissent paradoxales à tout le monde (à la victime, à ses proches, aux professionnels) et sont à l'origine chez la victime de sentiments de culpabilité et d'une grande solitude. Elles représentent un risque très importants pour sa santé (accidents, maladies secondaires aux conduites addictives).
La prise en charge est essentielle, elle consiste à :
1 – faire cesser les violences, mettre à l'abri et en sécurité, faire appel à la loi
2 – donner des informations et expliquer les mécanismes psychologiques et neurobiologiques psychotraumatiques pour que les victimes comprennent ce qui leur arrivent, pour qu'elles puissent se déculpabiliser et avoir une boîte à outils pour mieux se comprendre, mieux se protéger et mieux se soigner (cf la plaquette d'information "si vous subissez des violences")
3 – orienter vers des centres de soins spécialisés avec des médecins formés à la psychotraumatologie
4 – soigner : soulager la souffrance psychique en priorité, aider à éviter les conduites dissociantes, identifier la mémoire traumatique qui prend la forme de véritables mines qu'il s'agit de localiser, puis patiemment de désamorcer et de déminer, en rétablissant des connexions neurologiques, en faisant des liens et en réintroduisant des représentations mentales pour chaque manifestation de la mémoire traumatique. Il s'agit de "réparer" l'effraction psychique initiale, la sidération psychique liée à l'irreprésentabilité des violences. Effraction responsable d’une panne psychique qui rend le cerveau incapable de contrôler la réponse émotionnelle ce qui est à l'origine du stress dépassé, du survoltage, de la disjonction, puis de l'installation d'une dissociation et d'une mémoire traumatique. Cela se fait en "revisitant" le vécu des violences, accompagné pas à pas par un "démineur professionnel" avec une sécurité psychique offerte par la psychothérapie et si nécessaire par un traitement médicamenteux, pour que ce vécu puisse petit à petit devenir intégrable, car mieux représentable, mieux compréhensible, en mettant des mots sur chaque situation, sur chaque comportement, sur chaque émotion, en analysant avec justesse le contexte, ses réactions, le comportement de l'agresseur. Cette analyse poussée permet au cerveau associatif et à l'hippocampe de refonctionner et ainsi de reprendre le contrôle des réactions de l'amygdale cérébrale et d'encoder la mémoire traumatique émotionnelle pour la transformer en mémoire autobiographique consciente et contrôlable. Le but, c'est de ne jamais renoncer à tout comprendre, ni à redonner du sens, tout symptôme, tout cauchemar, tout comportement qui n’est pas reconnu comme cohérent avec ce que l’on est fondamentalement, toute pensée, réaction, sensation incongrue doit être disséqué pour le relier à son origine, pour l'éclairer par des liens qui permettent de le mettre en perspective avec les violences subies. Par exemple une odeur qui donne un malaise et envie de vomir se rapporte à une odeur de l'agresseur, une douleur qui fait paniquer se rapporte à une douleur ressentie lors de l'agression, un bruit qui paraît intolérable et angoissant est un bruit entendu lors des violences comme un bruit de pluie s'il pleuvait, un bruit de chaudière si le viol a été commis tout à côté d'une chaudière, une heure de la journée peut être systématiquement angoissante ou peut entraîner une prise d'alcool, des conduites boulimiques, des raptus suicidaires, des auto-mutilations s'il s'agit de l'heure de l'agression, une sensation d’irritation, de chatouillement ou d’échauffement au niveau des organes génitaux survenant de façon totalement inadaptée dans certaines situations peut se rapporter aux attouchements subis, des “fantasmes sexuels” violents, très dérangeants dont on ne veut pas, mais qui s’imposent dans notre tête ne sont que des réminiscences traumatiques des viols ou des agressions sexuelles subies…
Rapidement, ce travail se fait quasi automatiquement et permet de sécuriser le terrain psychique, car lors de l'allumage de la mémoire traumatique le cortex pourra aussitôt contrôler la réponse émotionnelle et apaiser la détresse sans avoir recours à une disjonction spontanée ou provoquée par des conduites dissociantes à risque. La victime devient experte en "déminage" et poursuit le travail toute seule, les conduites dissociantes ne sont plus nécessaires et la mémoire traumatique se décharge de plus en plus, la sensation de danger permanent s'apaise et petit à petit il devient possible de se retrouver et d'arrêter de survivre pour vivre enfin.
Les violences en général et les violences sexuelles en particulier ont donc de très graves conséquences et sont une atteinte à l'intégrité physique et psychique des victimes. Si les victimes ne sont pas soignées, leur vie est fracassée.
Les violences sont à l'origine de nouvelles violences dans un processus sans fin du fait de la mémoire traumatique et des conduites dissociantes violentes contre soi-même ou contre autrui. Les conduites dissociantes contre autrui sont choisies par un petit nombre de victimes qui vont se ranger du côté des agresseurs, du côté des dominants et s'autoriser à se dissocier et s'anesthésier en transformant une personne en fusible pour disjoncter sans risque par la violence extrême et insensée qu'ils lui font subir. La victime est toujours innocente face aux violences, elle est piégée dans un scénario qui ne la concerne pas, à jouer de force le rôle de victime. Ces conduites violentes ne sont possibles que dans un cadre inégalitaire qui permet de fabriquer des victimes toutes désignées et de les instrumentaliser le plus souvent en toute impunité.
Les violences sexuelles ne sont pas une fatalité, elles n'ont rien à voir avec la sexualité et le désir sexuel, elles ne sont que des violences terriblement efficaces (les plus efficaces avec la torture) pour détruire, dégrader et soumettre l'autre. Il est possible de lutter contre elles en protégeant les droits, la sécurité et l'accès aux soins de ceux qui en sont le plus les victimes : les enfants et les femmes, en œuvrant pour qu'ils bénéficient d'une réelle égalité, et en ne laissant pas impunies ces infractions pénales.
octobre 2009
Dr Muriel Salmona
Psychiatre, psychotraumatologue
responsable de l’Antenne 92 de l’Institut de Victimologie
memoiretraumatique.org
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Autres billets du Docteur Muriel Salmona
RFI – État des lieux de la situation des droits de l'enfant dans le monde
11 mars 2010 – Colloque "Viols et aggressions sexuelles : comprendre pour agir" Extrait intervention de Muriel Salmona
Mécanismes des violences : quelles origines ?
Ce qui se passe dans notre cerveau quand on est confronté à une grande peur – par Vincent Corbo
Je vous remercie ,
RépondreSupprimercet article, votre travail apporte un vrai sens, des informations cliniques accessibles et permettant un diagnostic plus ciblé, ... de mettre des mots scientifiques sur des ressentis, des observations, des réalités que subissent beaucoup de femmes,
Noëlle Le Dréau
analyste transgénérationnelle
Mais que dire des psychologues sensés aidés les victimes ? Peu sont compétents. Peu entendent ou traitent la blessure du traumatisme comme une simple déchirure narcissique.
RépondreSupprimerJ'ai vécu l'inceste et d'autres formes d'abus sexuels (dont viols). Je suis anéantie mais je continue à espérer qu'un jour je verrai la fin de ce long tunnel long et noir....
J'ai toujours vécu morte.
Merci, psychologues incompétents, qui, au lieu d'empathie, rassurez votre narcissisme en vous pavanant de colloques en colloques.
Ce sont les victimes qui devraient parler !
Cordialement,
Une victime anomyme.
Ordinairement, je ne publie pas les commentaires négatifs que l'on envoie sur mon blog (il y en a malheureusement beaucoup) mais le votre à l'avantage de ne pas être agressif et il est bien écrit, donc engage au dialogue.
RépondreSupprimerJe suis moi aussi entre deux eaux envers les "psy". Après un cancer, j'ai suivi une psychothérapie à l'institut psychosomatique durant six ans. J'ai arrêté il y a deux mois, parce que j'avais l'impression d'y faire salon, de me faire engueuler comme un bébé. Curieusement, nous n'avons presque jamais aborder les viols, ni mes différentes personnalités. Je pense que seule la personnalité sociale s'asseyait dans le fauteuil et que c'était elle que l'on remettait sur les rails lorsqu'elle déraillait.
Les autres personnalités étaient des personnages de fiction.
C'est pourquoi j'ai commencé un roman : Interdits ordinaires dont vous trouverez quelques extraits sur mon autre blog : http://resilience-autofiction.over-blog.fr/categorie-11033806.html.
Je me pose la question quant à savoir si l'écriture n'est pas une bonne thérapie. Je vais beaucoup mieux depuis que j'ai mes blogs. Et vous, avez-vous un blog ?
Oui, je me reconnais dans le descriptif du Dr Muriel Salmona , enfin en partie car je me suis toujours opposée à affliger de la violence à " l'autre " et c'est pourquoi je me suis retrouvée certainement à vivre successivement des relations dangereuses et donc à subir des violences sur moi . J'ai tjrs été combative et consciente de mon " anormalité " et c'est pourquoi je suis allée consulter . J'ai eus plusieurs thérapeutes puis je me suis maintenue pendant 2 ans avec une psychologue mais j'ai interrompu sans avoir été guérrie alors j'ai rechuté et je me suis retrouvée à vivre à nouveau une relation pleine de morbidité et de souffrances pour en résulter à un cataclisme qui a failli aboutir à ma mort....depuis , je suis en recherche à me " sauver " de cet enfer et trouver des solutions mais je suis sans résultat malgré ma grande mobilisation ....oui , voyez-vous , ce sont les vacances !!! un comble de devoir vivre cet affront et que personne ne répond présent car ce sont " les vacances " !!! alors ke dire de ces centres spécialisés en " victimologie " , " traumatologie " se proclamant compétents pour répondre à la souffrance de ces victimes mais s'affichant abscents pour les vacances !!!! soyez sérieux !!!! les relais n'existent pas dans ces centres dits " spécialisés " !!! alors que dire de leur prise en charge si ce n'est qu'une facette et non un réel travail de soins
RépondreSupprimerIl y a des jours, et surtout des jours dits de vacances, qui sont toujours les mêmes pour nous qui n'avons pas de vacances avec nos crises d'angoisses et nos questions.
RépondreSupprimerLe blog est malheureusement plus fréquenté pendant les vacances. On nous rétorquera que c'est parce que nous avons plus de temps et je répondrai que c'est parce que notre solitude nous donne plus de temps.
Je lis beaucoup plus et je laisse au moins 2 billets par jour, pour moi et pour vous aussi, lire et comprendre plus. J'espère que vous trouvez des réponses.
C'est vrai que beaucoup de "PSYCHIATRES, PSYCHOLOGUES" ne sont pas du tout former pour comprendre les victimes de viols et d'incestes. J'ai moi même essayer de me faire suivre par un psy, mais je me suis rendue compte que je parlais plus que lui et que finalement ça n'allait pas mieux. Peut-être que se faire prescrire des antis dépresseurs comme ce fût mon cas a soulagée ma souffrance moral, mais en aucun cas n'a résolu mon mal être quotidien. Finalement j'ai du apprendre à m'aider moi même par d'autres moyens le sport, la danse, et un travail permanent avec moi même qui fini par être usant et fatiguant et même si j'arrive à vivre par ma seule volonté, il y a toujours un moment dans la journée ou un malaise psychique et physique s'empare de moi. Et comme je suis en contrôle permanent avec moi même ça ne se voit pas, mais à l'intérieur c'est une vrai cocotte minute.
RépondreSupprimerPour résumé je dirai que nous victimes ne vivons pas mais survivons pour enfin un jour peut-être trouvé cette paix intérieure. Seules les victimes peuvent comprendre la nécessité d'être aider et soutenues par de vrais professionnels et grâce à des personnes compétentes comme le Dr Muriel Salmona, je me dis qu’il y a de l’espoir. Bon courage à toutes les victimes.
Merci anonyme pour ce beau commentaire. C'est rassurant en même temps de savoir que les passages à vide du milieu de journée, récurrents, peuvent venir de là et pas seulement d'une vue de l'esprit.
RépondreSupprimerJe me suis accrochée derrière l'écriture et l'essai de description de ce qui se passe de façon à aider les professionnels pour qu'ils nous aident.
Vous écrivez bien, pouvez-vous écrire plus ?
Sur mon autre blog résilience – à laquelle je ne crois pas – j'ai mis un passage de livre pour vous donner de l'allant.
http://resilience-autofiction.over-blog.fr/article-8-un-cas-exceptionnel-de-resilience-victor-frankl-56531167.html
Bon courage !
Merci pour le compliment. Je n'hésiterai pas à écrire et vous faire part de mon ressentie.
RépondreSupprimerEncore une fois bon courage à toute les victimes et garder l'espoir d'être enfin libérée de vos souffrances. N'oubliez jamais que vous êtes victimes et non coupable du mal que l'on vous a fait.
pour la non culpabilité, je suis bien d'accord avec vous, mais pas pour la victimisation.
RépondreSupprimerJ'ai une rubrique victime dans laquelle j'ai mis certains billets qui nous permettent de ne pas allez systématiquement dans le sens de ce que veux faire de nous la société actuelle.
J'ai retenu un article :
http://viols-par-inceste.blogspot.com/2010/07/2.html